Prionocheilus mendax

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Prionocheilus mendax (Vanek 1965)

Notes sur des exemplaires de Traveusot en Guichen

et de Château-Gaillard en Bain de Bretagne (I & V)

Prionocheilus mendax est un Calymenidæ assez rare de l’ordovicien moyen armoricain.
Une carapace dorsale complète remarquablement conservée (« Château-Gaillard » en Bain de Bretagne / I & V – n° 377 ), un céphalon et fragment de carapace (« Château-Gaillard » en Bain de Bretagne / I & V – n° 440 moule ext.), un céphalon et thorax incomplets (Traveusot en Guichen / I & V – n° 396 ; moule int. et ext.) m'ont permis les quelques notes et clichés qui suivent.

Systématique

(D'après « Trilobites de France » Patrice LEBRUN 2002)

  • Ordre Phacopida SALTER 1864
  • Sous-ordre Calymenina SWINNERTON 1915
  • Famille Bathycheilidæ PRIBYL 1953
  • Sous-Famille Pharostomatinæ HUPE 1953
  • Prionocheilus mendax (VANEK 1965)


Répartition géographique

L'espèce est commune à l'arc ibéro-armoricain et s'étend également à la Bohême.
Au Portugal elle est présente au Llandeilo à Valongo mais elle est soupçonnée au Llanvirn (?) (Delgado 1908). En Espagne centrale (au sud de Ciudad Real et dans la région d'Almaden) ainsi que dans le massif armoricain, l'espèce est exclusivement Llandeilienne (Rabano 1984 ; Henry 1980a) (I & V ; Mayenne ; Sarthe).
(En 1980, Jean-Louis HENRY notait qu'elle n'avait jamais été trouvée dans la partie occidentale du synclinorium médian armoricain – Formation de Postolonnec)
En Bohême, elle est présente du Llandeilo (Formation de Dobrotiva) au Caradoc inf. (Formation de Letna) (Vanek 1965).

Description

(Voir photo n° 1 & 2)

Trilobite Calymenidæ à carapace robuste et segmentation très apparente. Le céphalon est semi-circulaire à fines pointes génales et glabelle parabolique incisée par des sillons glabellaires profonds ; thorax au rachis puissant, pygidium plus ou moins losangique de type hétéropyge.
La granulation de la carapace, très nette, est générale.


Photo n° 1 – Vue générale d'un nodule fossilifère avec une carapace dorsale complète de Prionocheilus mendax remarquablement conservée
(« Château-Gaillard » en Bain de Bretagne / I & V n° 377).

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Photo n° 2 – Vue latérale du spécimen « Château-Gaillard » en Bain de Bretagne / I & V n° 377 – Remarquer le pédoncule portant l'oeil.

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Le céphalon

(Voir : #REDIRECT Trilobites : éléments de nomenclature céphalique

Il est semi-circulaire et flanqué de 2 pointes génales fines, légèrement orientées vers l’extérieur, qui se terminent au niveau du troisième anneau articulaire.
(Voir photo n° 3 & n° 6).
Le bourrelet céphalique est fort et plus large en zone frontale, il est entièrement recouvert d'une fine granulation ;
la doublure céphalique latérale est bordée par une série d’épines disposées en dents de scie (Voir photo n° 4 & n° 5 bis).

Photo n° 3 – Détail du spécimen n° 377, céphalon et partie supérieure du thorax. Remarquer le brachiopode fixé en bas à droite.

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Photo n° 4 – Détail du spécimen n° 377 ; vue latérale du céphalon, remarquer la rangée d'épines disposées en dents de scie.

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La zone oculaire est fortement bombée à l’instar de ce que l’on observe chez le genre Neseuretus. L’œil est porté par un pédoncule court et conique.
(Voir photo n° 2 & n° 5). L’aire oculaire est proéminente ; toute la zone de part et d’autre de la branche antérieure de la suture faciale et du tronçon péri-oculaire, est fortement abrupte au-dessus du bourrelet céphalique latéral.
La suture faciale est de type opisthopariale.

(Voir : #REDIRECT Trilobites : éléments de nomenclature céphalique

Le champ préglabellaire est court ; le sillon préglabellaire très net, est bordé vers l’extérieur par une granulation accrue (Voir planche n° 1).
Une dépression lisse sépare le bourrelet frontal du sillon préglabellaire. Des fossules antérieures sont nettement visibles de part et d'autre du lobe frontal glabellaire.
(Voir planche n° 1).


Photo n° 5 – Détail du spécimen n° 377 ; vue frontale.
Remarquer le bourrelet céphalique frontal fort et la zone oculaire très proéminente, l'oeil est porté par un pédoncule . Trilobite-96.jpg


Photo n° 5 bis – Détail du spécimen n° 377 ; Remarquer la granulation du bourrelet frontal céphalique.

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Photo n° 6 – Détail d'un moule externe de « Château-Gaillard » en Bain de Bretagne, exposant particulièrement bien la pointe génale,
la granulation et la cicatrice laissée par le pédoncule oculaire.

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La glabelle

De forme parabolique, elle est bordée latéralement par des sillons dorsaux profonds. Le lobe frontal est arrondi antérieurement.
Elle est fortement bombée, les sillons glabellaires S1 et S2 très profonds, déterminent des L1 ; L2 et un lobe frontal proéminents.
Les S1 se divisent en 2 branches : l’une courte est orientée vers l’avant, l’autre plus longue se dirige vers l’anneau occipital sans l’atteindre. Les S2 sont courts.
La granulation de la glabelle est générale et régulière. Le sillon occipital est net ; l’anneau occipital puissant ne montre pas de tubercule médian.
(observation sur moule int. et ext.). (Voir planche n° 1 ci-dessous).

Planche n° 1 – 2 moules externes permettant d'observer les principaux caractères céphaliques et en particulier la structure glabellaire.

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Le thorax et le pygidium

(Voir : #REDIRECT Trilobites : éléments de nomenclature thoracique
(Voir : #REDIRECT Trilobites : éléments de nomenclature pygidiale

Le thorax (voir photos n° 1, 2 & 8) est caractérisé par un rachis très fort. La largeur de ce dernier, mesuré au niveau du premier anneau, est de 9 mm pour une largeur de carapace de 20 mm. (observation du spécimen n° 377 Château-Gaillard en Bain de Bretagne (I & V)
Il est composé de 13 anneaux axiaux dont l’allongement transversal s’amenuise progressivement jusqu’au pygidium (il passe de 9 mm à 5 mm sur ce spécimen).
La convexité transversale du rachis est assez forte, la partie proximale est plane, ensuite le profil de l’épine pleurale est abrupte.
La granulation de la surface thoracique est générale et régulière. Les sillons pleuraux sont très apparents et ne montrent pas d’interruption en zone médiane de la plèvre.
Un examen attentif de l’extrémité latérale de la partie proximale au niveau de chaque plèvre, montre une légère excroissance : c’est le processus fulcral qui s’emboîte dans une fossette articulaire creusée sur le bord postérieur de la plèvre adjacente antérieure. C’est à ce niveau que le profil thoracique montre une « rupture de pente » pour devenir abrupt.

NOTE : Présence d’un brachiopode fixé (?) sur la carapace (voir photo n° 3 )

L'exemplaire n° 377 permet d’observer à la droite des 1er et 2ème anneaux axiaux, sur le sillon dorsal droit, un brachiopode articulé (genre Aegiromena ?). Ces organismes bivalves vivaient fixés sur un support, (peut-être ici la carapace d’un trilobite ?), soit par leur valve ventrale, soit par un pédoncule plus ou moins long. Ce phénomène se rencontre fréquemment sur la carapace des crustacés actuels. Ici hasard de la fossilisation (?), réel support (?) il est difficile de se prononcer...


Le pygidium (voir photo n° 7) est de dimensions inférieures au céphalon (type hétéropyge). Sa forme générale est plus ou moins losangique ;
Il présente des caractères assez communs avec le pygidium de Neseuretus tristani (Calymenacæ).
Le rachis est bien délimité par 2 sillons axiaux profonds. 6 anneaux axiaux sont bien observables, les sillons transverses s’amenuisent pour devenir obsolètes.
Le rachis aboutit à une pièce terminale de forme triangulaire qui s’arrête avant l’extrémité du pygidium. Il n’y a pas d’épine caudale, mais une très faible crête (pygidium mucroné).
Les plèvres débouchent dans un sillon marginal parallèle à la bordure pygidiale externe. Cette dernière est lisse.
Les sillons interpleuraux sont nets, par contre les sillons pleuraux ne sont que faiblement discernables. Les lobes pleuraux montrent une pente très accusée.
La granulation du pygidium est générale et régulière.


Photo n° 7 – Détail du spécimen n° 377, le pygidium.

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Observations :

Prionocheilus mendax, présente un certain nombre de caractères communs aux Calymenacæ.
Les caractères morphologiques observés chez Prionocheilus mendax, mais aussi chez Neseuretus Tristani, permettent de penser que ces organismes étaient adaptés à un mode de vie benthique : bordure céphalique antérieure puissante et largement pourvue d’une granulation de type sensoriel ; carapace épaisse et robuste permettant par des mouvements adaptés un enfouissement rapide dans un substrat meuble ; des yeux situés au sommet d’un pédoncule court, lui même disposé sur une zone fortement convexe du céphalon, donnant une vision circulaire efficace afin de prévenir l’arrivée d’éventuels prédateurs ; la courbure de la bordure céphalique (voir photos n° 5 et n° 5 bis), ample et formant en position de repos une sorte de dépression ouverte vers l’extérieur, ce qui avait pour effet en ce positionnant face au courant, de recevoir un flux nutritif continu.

Il est plausible également que le mécanisme d’enroulement de la carapace (conséquence d’une modification brutale de l’environnement ou réaction face aux prédateurs) chez Prionocheilus mendax ou chez Neseuretus tristani était semblable avec le blocage de la pièce terminale du pygidium dans la dépression formée sous le bord frontal du céphalon en position d’enroulement.

Chez Prionocheilus mendax la doublure céphalique latérale ornée d’une série de pointes en dents de scie peut être interprété comme une amélioration de la stabilité de l’organisme sur un support meuble, les pointes agissant comme des « crampons » (?). Les pointes génales perfectionnaient encore la stabilité en améliorant l’équilibre de part et d’autre du céphalon.


Photo n° 8 – Cliché N&B mettant en évidence l'intense granulation
générale de la carapace

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A consulter absolument :

  • « Trilobites ordoviciens du Massif Armoricain » (Mém. Soc. Géol. Minéral. Bretagne 22 / 1-250 Rennes 1980) Jean-louis HENRY
  • « TRILOBITES » de Patrice LEBRUN – 1995 ; Editions CEDIM – Minéraux et Fossiles ; ISBN 0335-6566 HS2
  • « TRILOBITES de France »de Patrice LEBRUN – 2002  ; Editions CEDIM – Minéraux et Fossiles ; ISSN0335-6566
  • « Trilobites from the ordovician of Portugal » Michaël ROMANO 1991
  • France. Introduction à la Géologie de l’ouest. 26ème congrès géologique international (Jean-Jacques CHAUVEL - Michel ROBARDET) Paris 1980.
  • Mémoires du BRGM. Colloque Ordovicien-Silurien. Editions du BRGM. Brest / septembre 1971. N° 73.


(Les clichés originaux ont été réalisés avec un APN Canon PowerShot A710, les planchesconstruites avec le logiciel Adobe Photoshop)


Yvan LEMEUR le 10 décembre 2007