Dionide mareki

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Dionide mareki Henry & Romano 1978

Dionide mareki est un trilobite ordovicien aveugle qui se caractérise par de très longues pointes génales effilées, un céphalon semi-circulaire au large limbe bilamellaire dont la glabelle, fortement convexe, possède une importante épine sommitale. Appartenant au morphotype des trilobites à limbe perforé, il est considéré par les auteurs comme possèdant tous les caractères d’un organisme benthique plutôt adapté au milieu obscur
d’une profondeur relativement importante.


Position systématique

(d’après “Trilobites de France” P. Lebrun – Mars 2002)

  • Ordre : Asaphida Salter 1864
  • Super-famille : Trinucleoidea Hawle & Corda 1847
  • Famille : Dionididæ Gürich 1908
  • Dionide mareki Henry & Romano 1978


Tous les exemplaires utilisés dans ces quelques notes, soit une vingtaine de spécimens incomplets (céphalons, pygidiums, fragments de carapaces ; une seule carapace dorsale pratiquement complète), proviennent d’une des nombreuses occurences fossilifères (aujourd’hui malheureusement disparue) de Château-Gaillard en Bain-de-Bretagne (I & V), secteur localisé dans le synclinorium de Martigné-Ferchaud au sud de Rennes.
La rareté du matériel (du moins pour cette espèce) est largement compensée par la qualité des exemplaires.
La faune trilobitique est issue de nodules argilo-silicieux de couleur bleu-noir, souvent très durs (dépôts sédimentaires de vases noires) ou plus rarement de nodules gréseux altérés, pulvérulents, rougeâtres. Ces nodules se retrouvent épars à la surface des champs, les siltstones micacés dont ils proviennent
n’affleurent que très ponctuellement.
La faune, particulièrement riche et variée, souvent remarquablement conservée, est typiquement Llandeilienne (Llanvirnien proparte) et appartient à la formation de Traveusot.
Les espèces les plus communes que j’ai rencontré en ce lieu sont Colpocoryphe rouaulti ; Phacopidina micheli ; Guichenia dufouri ; Placoparia tournemini "; plus rarement Zeliszkella lapeyrei ; Prionocheilus mendax ; Eodalmanitina destombesi, Salterocoryphe salteri, Selenopeltis gallicus gallicus… ainsi que de nombreux Asaphidæ et Illænidæ, également des céphalopodes du genre Orthoceras, des brachiopodes, échinodermes etc......

Répartition géographique

Présent dans le synclinorium de Martigné-Ferchaud au sud de Rennes (La Saudrais/Traveusot ; Secteur de Bain de Bretagne / La Dominelais), Dionide mareki est également bien connu dans la formation du Pissot en Normandie ; sans doute également dans le secteur de La Pouëze (nord d’Angers) où les spécimens sont souvent très déformés. Il serait inconnu dans le Synclinorium médian armoricain (Jean-Louis Henry – 1980).

Le genre montre une assez large répartition géographique.
Espèces proches : Dionide Formosa (Barrande) (Caradoc de Bohême et de Turquie) ; Dionide Jubata Raymond (Llandeilo de Bohême et Llanvirn du Shropshire en Grande-Bretagne).

Le genre est également observé dans l’Ordovicien moyen du Maroc (Formation de Tachilla – “L’Ordovicien moyen de l’Anti-Atlas marocain : paléobiodiversité, révision biostratigraphique et corrélation » Juan Carlos Gutiérrez-Marco, Jacques Destombes, Isabel Rábano, Guillermo Federico Aceñolaza, Graciela Noemí Sarmiento, Miguel Ángel San José – 2002).

Dionide mareki est présent dans les schistes ordoviciens du Valongo (Portugal) confirmant l'existence d’affinités certaines durant le Llandeilo entre la région de Valongo (environs de Porto) et les synclinoriums de Martigné-Ferchaud et Saint-Julien-de-Vouvantes au Sud de Rennes (“Le genre Dionide Barrande, 1847, dans l'Ordovicien du Massif Armoricain et du Portugal” J.L. Henry & M. Romano 1978).


Morphologie générale

Les Dionididæ montrent une structure céphalon/thorax/pygidium de longueur sub-égale (type isopyge) et se caractérisent par la présence d’un limbe perforé, de très importantes épines céphaliques et d’une glabelle fortement convexe.

Photo n° 1 – Carapace dorsale bien conservée de Dionide mareki

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Le céphalon

(Voir les photos n° 2 à n° 9)

(Voir : Trilobites : éléments de nomenclature céphalique

Le céphalon de Dionide mareki est semi-circulaire, bordé d’un bourrelet céphalique prononcé. Le champ préglabellaire est relativement abrupt sur les spécimens disponibles. Les joues sont couvertes de petites fossettes anastomosées (cæca génaux), disposées de façon non organisée et à peu près toutes de taille identique ; elles se déploient latéralement vers les fixigènes à partir d’un point situé au niveau des sillons dorsaux et au tiers antérieur de la glabelle (voir photo n° 5). Le limbe, composé d’une lamelle supérieure et d’une lamelle inférieure, porte immédiatement en arrière du bourrelet céphalique, une rangée de fossettes circulaires plus importantes, ainsi que des gros tubercules. Fossettes et tubercules se poursuivent jusqu’à l’angle génal ; Les fossettes situées sur le champ préglabellaire et la bordure marginale sont plus réduites et forment de petites dépressions circulaires. La limite limbe/joues est nettement marquée.

Le sillon postérieur est rectiligne délimitant un bourrelet céphalique postérieur assez large. Ce dernier est rejoint par le bourrelet céphalique latéral au niveau de l’angle génal. Celui-ci se prolonge par une très longue pointe effilée (rarement conservée intégralement), de structure creuse, portée par la lamelle inférieure et se situant dans le prolongement du talon (épaississement de la lamelle inférieure parallèle à la bordure céphalique).

La glabelle est de forme sub-quadratique sur les spécimens non déformés. Elle est fortement convexe, en particulier dans sa partie frontale. Elle est séparée de l’aire frontale par un fin sillon préglabellaire. Les sillons dorsaux sont nets.

La surface glabellaire lisse, porte en son sommet une longue (?) épine orientée directement vers l’arrière (cette épine à structure creuse, est toujours brisée sur les spécimens, seule demeure une cicatrice circulaire).

Semi-circulaire en zone frontale, la glabelle se resserre nettement dans sa partie postérieure formant une zone relativement étroite (le lobe pré-occipital médian) aboutissant à l’anneau occipital et séparée de celui-ci par un sillon occipital bien marqué. Cette partie postérieure de la glabelle montre latéralement et de part et d’autre une courte et profonde dépression : le sillon intercalaire, déterminant deux lobes pré-occipitaux.
La partie médiane de l’anneau occipital porte un tubercule pouvant avoir une fonction sensitive (?).

Photo n° 2 – Eléments de nomenclature céphalique

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Photo n° 3 – Eléments de nomenclature céphalique

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Photo n° 4 – Céphalons (moules externes)

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Photo n° 5 – Céphalon – Mise en évidence des cæca génaux

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Photo n° 6 – Eléments de nomenclature céphalique

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Photo n° 7 – Zone glabellaire

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Photo n° 8 – Pointe génale (moule externe)

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Photo n° 9 – Pointe génale

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Le thorax

(Voir les photos n° 10 à 12)

(Voir : Trilobites : éléments de nomenclature thoracique

Le thorax est composé de 6 segments à plèvres droites et planes, perpendiculaires à l’axe dorsal. Le premier segment thoracique est nettement plus important que les suivants (macroplèvre).
Les 6 anneaux du rachis sont larges et bien individualisés. Les sillons dorsaux sont profonds.
Le premier anneau axial porte latéralement et de chaque côté une profonde invagination pouvant correspondre à des points d’insertion musculaire.
Il semblerait qu’il existe également sur cet anneau un tubercule médian (?).
Les plèvres sont planes, présentant un bombement à proximité du sillon dorsal. Chaque plèvre est barrée en diagonale par un sillon pleural net. Les extrémités latérales s’orientent brusquement vers l’arrière en une courte épine pleurale.

Photo n° 10 – Les 2 premiers anneaux thoraciques

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Photo n° 11 – Carapace dorsale incomplète

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Photo n° 12 – Tubercule médian sur le premier anneau thoracique

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Le pygidium

(Voir la photo n° 13)

(Voir : Trilobites : éléments de nomenclature pygidiale

Le pygidium de Dionide mareki est sub-semicirculaire, d’une largeur environ du double de sa longueur. Sa dimension est sensiblement équivalente à celle du céphalon (type isopyge). On observe une bordure lisse et plane, soulignée par un fin bourrelet sur tout le pourtour, séparée des lobes pleuraux par un sillon marginal bien marqué.

Les lobes pleuraux, pratiquement plans, montrent une segmentation prononcée : les sillons interpleuraux sont en effet bien marqués et nettement orientés vers la partie postérieure, ils se terminent au niveau du sillon marginal.

Le rachis pygidial est puissant, de forme générale conique, délimité par des sillons axiaux accusés. Il est composé d’au moins 15 anneaux axiaux très bien individualisés et d’une petite pièce terminale aboutissant au sillon marginal. La surface est légèrement granuleuse.

Photo n° 13 - Pygidium

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Mode de vie

Le morphotype particulier de ce trilobite aveugle a conduit les auteurs à considérer sa présence comme le signe d’un environnement profond au substrat meuble (Luminosité réduite, matière organique en décomposition, faible oxygénation...).
Dans ce milieu hostile, les joues pourvues de cæca anastomosés pouvaient faire office d’organe respiratoire de substitution (Jell 1978 / Chatterton 1980).
Des organes ou appendices sensoriels annexes diversifiés paliaient à l’absence totale d’yeux (Epines céphaliques, poils sensoriels, tubercules etc...).
Ainsi, les deux longues pointes génales effilées, dépassant largement la base du pygidium, pouvaient-elles contribuer à l’orientation optimum du céphalon durant l’activité de l’organisme (nutrition, déplacement) (Clarkson 1969), ce rôle pouvant être également dévolu à la très longue épine glabellaire (orientation / détection). Elles pouvaient également éviter l’enfoncement de la carapace dans des sédiments très meubles (boue sédimentaire, dépôt de vases noires...) et ainsi contribuer efficacement à la stabilisation de l’organisme par répartition de sa masse (Hammann et al. 1986 ; Hammann & Rabano 1987).
La présence d’épines céphaliques importantes permet de penser que ces organismes ne devaient pouvoir effectuer que des déplacements lents.

Le limbe perforé, caractéristique de ce morphotype (Trinucléidæ, Dionididæ), souvent considéré comme étant une structure très sensible, permettait d’indiquer les variations du courant (Campbell – 1975 pour les fossettes du Trinucléidé Cryptolithus) ; pour d’autres auteurs cette structure particulière contribuait à l’allègement de la carapace (?) (Chatterton – 1980 pour les Chéirudidæ) ou jouait le rôle d’un filtre à particules optimisant ainsi l’alimentation de l’organisme (Fortey & Owens, 1999 pour le Trinucléidæ Cryptolithus).

Photo n° 14 – Carapace dorsale incomplète

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Photo n° 15 – Carapace dorsale incomplète

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Photo n° 16 – 2 Carapaces dorsales incomplètes

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Photo n° 17 – Carapace dorsale incomplète

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(Les clichés originaux ont été réalisés avec un APN Canon PowerShot A710, les planches construites avec le logiciel Adobe Photoshop)


A consulter

  • “Trilobites ordoviciens du Massif armoricain” (Jean-Louis HENRY) Mémoires de la Société Géologique et Minéralogique de Bretagne. N° 22 / 1980.
  • “Le genre Dionide Barrande, 1847 (Trilobite) dans l'Ordovicien du Massif Armoricain et du Portugal” (Jean-Louis HENRY) 1978.
  • “Trilobites” (Patrice LEBRUN) Editions « Minéraux et Fossiles » Déc. 1995.
  • “Trilobites de France” (Patrice LEBRUN) Editions « Minéraux et Fossiles » Mars 2002.
  • “Feeding habits in Trilobites” Fortey, R.A., & R.M.Owens 1999.


Yvan LEMEUR, le 21 février 2008


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